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CDI et esclavage : des liens plus étroits qu’on ne l’imagine !

CDI et esclavage

Le contrat de travail à durée indéterminée est la forme de contrat la plus connue et la plus répandue. Par défaut, il s’agit même du premier contrat qu’un employeur doit proposer lors d’une nouvelle embauche. 

Pourtant, au regard du droit social, la naissance du CDI est relativement récente. L’ancêtre du CDI émerge à la fin du 19e siècle. La loi du 27 décembre 1890 signe la naissance du salariat avec la mention d’un « louage de services fait sans détermination de durée ». 

Paradoxalement, la naissance du salariat s’inscrit dans le prolongement des lois d’abolition de l’esclavage. Le 27 avril 1848, l’esclavage est aboli. Se pose alors la question de la main-d’œuvre et de la nécessité de fidéliser celle-ci pour pérenniser l’activité. Le temps aidant, le contrat de travail à durée indéterminée va naître. 

Au programme, 

  1. La fin de l’esclavage en France
  2. La naissance du CDI 
  3. Quel avenir pour le CDI ?  

La fin de l’esclavage en France 

Les principes fondateurs des philosophes des Lumières 

Dès le 18e siècle, les philosophes des Lumières ont affirmé l’égalité entre les hommes et le droit naturel de chacun à la liberté. C’est dans ce contexte qu’on finira par s’interroger sur la légitimité de l’esclavage. En 1794, l’abolition de l’esclavage est prononcée dans les colonies, mais avortée dès 1802. En effet, les planteurs parviennent à imposer leur point de vue et l’esclavage est rétabli.  

Le 27 avril 1848, date phare de l’abolition de l’esclavage

Ce n’est que le 27 avril 1848 que Victor Schoecher, sous-secrétaire d’État à la Marine, parvient à faire adopter le décret d’abolition de l’esclavage, suivi par l’émancipation des esclaves. 

Cependant, les planteurs en vinrent à manquer de main-d’œuvre. Nombre d’entre eux décident alors de se tourner vers des recruteurs. Leur mission était d’acheter des esclaves. Ces derniers étaient immédiatement affranchis puis signaient des contrats dits d’engagement pour une durée de dix ans voire pour une durée illimitée…

De quoi nous rappeler certaines pratiques contemporaines, n’est-ce pas ? 

La naissance du contrat de travail à durée indéterminée 

Le contrat de louage de services

L’article 1780 du Code civil prévoit qu’ ” on ne peut engager ses services qu’à temps, ou pour une entreprise déterminée ». Au 19e siècle, il reste néanmoins possible d’établir un contrat de louage de services. Ce dernier constitue alors l’ancêtre du contrat de travail.
Progressivement, la loi du 27 décembre 1890 acte l’évolution du contrat louage de services qui peut désormais être conclu « sans détermination de durée ». 

Le contrat de travail remplace désormais le contrat de louage de services

Ce n’est qu’à partir de 1973 que l’expression contrat de travail vient progressivement supplanter celle de contrat de louage de services. En effet, pendant longtemps, le législateur a été réticent à faciliter la mise en place d’un contrat de travail sans limites de temps. Il craignait alors un retour à une forme d’esclavage. 

Le contrat de travail à durée indéterminée devient la norme 

Pour ne pas entraver la liberté de travailler, le législateur introduit la possibilité pour chaque partie de rompre la relation contractuelle. Par la suite, afin de préserver l’équilibre contractuel, le législateur ajoute en 1973 la notion de cause réelle et sérieuse. Peu à peu, le CDI tend à devenir la norme des contrats de travail. C’est d’ailleurs ce qu’entérine la directive du 28 juin 1999. Cette dernière indique que « les contrats de travail à durée indéterminée sont la forme générale de la relation de travail ». 

Quel avenir pour le CDI ? 

La crise sanitaire a permis à beaucoup de s’interroger sur son rapport au travail. La quête de sens, l’urgence climatique ou encore l’ère du tout numérique redessinent l’avenir du CDI et peut-être la fin de celui-ci…

De la guerre des bras à la guerre des talents 

Le CDI a longtemps été privilégié pour le recrutement d’ouvriers, où le besoin de fidéliser la main-d’œuvre était essentiel. Or, progressivement, cette tendance s’est légèrement inversée avec une tertiarisation de l’économie. Ce sont désormais près de 87 % des salariés du secteur tertiaire non marchand qui exercent en CDI. 

Ainsi, face aux évolutions technologiques qui ont conduit à la précarisation de l’emploi, le CDI n’est plus la seule norme. Des secteurs comme la construction recrutent trois fois plus en intérim que l’ensemble des secteurs d’activité, avec 7,9 % des recrutements qui ont lieu en intérim contre seulement 2,8 % pour les autres secteurs.

Les nouvelles attentes de la génération Z

La génération Z correspond aux jeunes actifs nés après 1995. Alors que leurs aînés considéraient souvent le travail comme une finalité, leur rapport au travail est marqué par l’avènement des réseaux sociaux et l’ère du tout numérique. 

L’accès immédiat à l’information les rend attentifs à l’image de l’entreprise qui souhaite les recruter. En parallèle, la génération Z est de plus en plus regardante sur  l’engagement sociétal et environnemental de l’entreprise. 

Par ailleurs, une majorité d’entre eux place le travail en équipe et l’intelligence collective comme un levier essentiel d’engagement. 

Des jobeurs en quête de plus d’autonomie, de liberté et de flexibilité

Le CDI a longtemps été érigé comme le « Graal ». Il représente d’ailleurs le modèle de contrat dominant avec plus de 73 % des jobeurs en 2021, d’après l’INSEE. Néanmoins, une tendance semble se dessiner avec de plus en plus de personnes qui refusent un CDI à l’issue d’un CDD. Derrière ce refus se dessine la volonté de privilégier sa vie personnelle et de rester libre de ses choix géographiques, ou bien de mener une activité freelance en parallèle. 

Ce besoin d’autonomie est d’ailleurs la grande tendance de la génération Z. Ils représenteront d’ici 2025 près de 50 % des postes en entreprise et sont largement séduits par le freelancing, le télétravail, ou encore le travail à temps partagé.  

Est-ce bientôt la fin du CDI ?

Le CDI a pendant longtemps été considéré comme le meilleur moyen de se prémunir de la précarité et de l’incertitude économique. Cependant, jobeurs et professionnels de l’emploi s’accordent de plus en plus sur sa rigidité. Cette dernière en ferait un frein à l’emploi et aux évolutions de carrière. Dans ce contexte-ci, de nouvelles formes de CDI semblent faire de plus en plus d’émules. C’est le cas par exemple du travail à temps partagé qui a déjà conquis près de 500 000 personnes en 2021 ou bien encore le portage salarial. Ces deux modes de travail permettent de répondre à la fois aux besoins de sécurité et de flexibilité exprimés par de nombreux jobeurs. 

Par ailleurs, il existe de nombreux contrats pour travailler et qui permettent de s’adapter à diverses situations. 

Pour conclure, le contrat de travail à durée indéterminée n’est pas une forme rigide d’emploi. Il suit lui aussi les évolutions du marché de l’emploi et démontre qu’il sait évoluer pour répondre aux attentes manifestées par les entreprises et les actifs. 

Le monde du travail est en profonde mutation. L’information accessible rapidement et facilement est venue redistribuer les cartes en matière d’attente d’engagement sociétal et environnemental. En outre, la pandémie a généralisé le travail à distance, la communication asynchrone et la nécessité d’un management plus horizontal. 

En parallèle, l’engagement et la motivation s’inscrivent plus que jamais à l’ordre du jour des entreprises. Ces dernières sont invitées à repenser l’expérience collaborateur et leur image de marque. Ainsi, elles parviendront à faire de celles-ci de véritables leviers de compétitivité, bien plus que le fait de proposer un CDI à ses nouvelles recrues.

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